L'inflation a changé de visage, et devient invisible aux yeux des marchés.
Depuis quelques temps, les experts vendent une désinflation durable, un "soft landing" assuré, mais c'est oublier un détail : l'inflation, ce n'est pas un chiffre, c'est un processus.
Ce processus est en train de muter en 2025. En juin, le CPI affiche +2.7% YoY, comme annoncé, et les hausses de coûts ne font que commencer à se transmettre. Les hausses de tarifs douaniers ne sont pas encore parfaitement reflétés dans les étiquettes de prix, donc il faut considérer cette hausse de 0.3% comme un répit.
CPI US. 15 juillet 2025
Autrement dit : le vrai pic inflationniste est à venir, notamment en juillet-août. Ce sera juste à temps pour coincer la Fed entre deux postures : rassurer les marchés ou admettre qu'elle a encore perdu le contrôle. Comme évoqué dans mon rapport du 20 juin, les cuts de la Fed ne sont pas acquis, et l'inflation de cet été arrivera trop tard pour être correctement prise en compte par la Fed en septembre.
Et dans l'économie réelle, les chaînes d'approvisionnement sont en première ligne de front. Le genre de choc que provoque un bouleversement de l'environnement commercial mondial comme celui de Trump ne se voit pas immédiatement dans les indices, malgré ce que veulent faire croire les analystes. Les entreprises amortissent d'abord, puis elles transfèrent, et c'est là qu'on en sera dans quelques mois : le moment où les prix commencent à glisser vers l'aval.
C'est un choc lent, mais profond, et surtout, un choc auto-renforçant, car une fois les prix réajustés, le plancher monte. L'inflation redevient stagnante, et les manuels scolaires de désinflation deviennent obsolètes.
On ne peut pas faire confiance aux indices, car le CPI ment par omission : l'inflation se déplace, et comment faire croire que tout va bien ? En s'appuyant sur un indice biaisé. En juin, le poste logement (qui pèse un tiers du panier du CPI, via un proxy incorrect) a ralenti : les loyers ne progressent plus que de +3.8% sur un an, leur plus faible rythme depuis fin 2021. Alors forcément, ça fait baisser la moyenne, mais c'est une illusion optique d'une naïveté difficilement comparable.
Car tout le reste repart à la hausse. L'essence, l'alimentationation à domicile, l'électroménager, les transports, etc. : tous en hausse.
Et pendant ce temps, on regarde les voitures d'occasion et les loyers, en baisse temporaire, comme si c'était des indicateurs avancés. Erreur d'échelle et erreur de lecture.
Le marché, fidèle à lui-même, parie sur un pivot de la Fed. En juin, malgré la remontée du CPI, les marchés estimaient encore à 60% la probabilité d'une baisse de taux dès septembre. La logique : croissance molle + inflation en repli = feu vert pour relâcher.